Le secteur Sontchon est apparu après la partition de la Corée et l’afflux de réfugiés du nord. D’abord occupants illégaux de parcelles longues et étroites, les habitants de ce nouveau quartier ont été régularisés au début des années soixante et une grande partie d’entre eux a pu acquérir les parcelles qu’elle occupait (70% au début des années soixante-dix). En 1979, le quartier a fait l’objet d’un projet original d’auto-rénovation, s’appuyant notamment sur un système de prêts bonifiés.
Le travail présenté ici montre un des scenarii possibles de cette auto-rénovation. Le projet s’appuie sur une étude approfondie du plan du bidonville de la Libération avant sa reconstruction. Celle-ci révèle l’intelligence contextuelle des habitants. Le ratio de surface par famille (cinq personnes) doit quasiment quadrupler en passant en moyenne de 20 m² à 75 m². Un espace libre de jardins de 600 m² doit être créé ainsi que 200 m² d’équipements. Les qualités identifiées au sein de l’ancien établissement sont maintenues: nombreux espaces partagés, hiérarchie des voies, orientations, répétitivité, mais singularité du bâti…
Le projet prévoit l’amélioration des logements en accompagnant des processus déjà opératoires et en permettant aux habitants de réaliser eux-mêmes l’opération. Il se développe désormais sur cinq niveaux alors que le bidonville n’était constitué que d’un seul niveau d’habitations. Les logements sont tous des duplex, ce qui permet d’anticiper l’évolution de la cellule familiale ou de louer une partie du logement afin d’assurer le remboursement des prêts.
Le premier niveau, construit en dur, est une sorte de plan minimum raisonné qui s’appuie sur l’ancienne organisation. Il devient la matrice de l’investissement par auto construction. Les modules d’habitations (de 50 ou 25 m²) sont réalisés en structure métallique sur un mode agrégatif. Une liste non définitive de différents éléments d’enveloppe et de partition sont proposés au choix des habitants. Certains éléments de l’architecture traditionnelle coréenne sont réinterprétés: chauffage au sol on-dol, parois coulissantes, circulations extérieures maru . Des colonnes de desserte (escaliers, ascenseurs) et de réseaux sont disposées régulièrement dans le nouveau quartier vertical ainsi que des jardins communs.
L’expérience de Sontchon interroge les principes de régénération et d’évolution transposés au contexte urbain, car « la nature évolue, c’est-à-dire ajoute et complexifie, sans retrancher » (1). La réorganisation du quartier s’appuie donc sur sa densification verticale et sur une façon particulière de “vivre ensemble” qui peut être perçue par certains comme du désordre, comme l’entropie d’un système. Pourtant un état de désordre revient aussi à un état de plus grande probabilité (2).
(1) André LABORIT, Biologie et structure, 1968.
(2) d’après Clausius qui introduit l’entropie en thermodynamique.